Le poids de la parole
La parole est une chose qu’on a trop banalisée, on la jette, on la répète, on l’habille de promesses ou de justifications... mais on ne la regarde plus pour ce qu’elle est vraiment ; elle est bien plus qu’un son, bien plus qu’un échange... elle est un acte, une vérité nue, une présence qui ne s’efface pas. Il n’y a rien de plus dangereux qu’une parole dite sans conscience ; rien de plus puissant non plus qu’une parole tenue, murmurée même, dans un monde qui crie...
La parole ne disparaît jamais vraiment, elle reste dans l’air, dans les souvenirs, dans les blessures, dans les silences qui suivent ; on peut croire qu’elle est oubliée... mais elle revient toujours, parfois dans un regard, parfois dans une nuit où tout s’effondre ; elle revient avec ce qu’elle a causé, avec ce qu’elle a éveillé... ou détruit.
Il y a des paroles qui construisent des ponts et d’autres qui brûlent ce qui restait encore debout, des paroles qui illuminent des zones d’ombre, qui sauvent un être au bord du gouffre ; et il y en a d’autres, prononcées avec légèreté, qui ouvrent des blessures que rien ne viendra refermer... Ce n’est pas la forme qui compte, ni même l’intention ; c’est le poids qu’elle porte, c’est ce qu’elle engage, c’est ce qu’elle dit de celui qui la prononce.
Un être humain, on ne le mesure pas à ce qu’il possède, ni à ce qu’il montre... on le mesure à sa parole ; ce qu’il en fait, ce qu’il en assume, ce qu’il en sauve... et ce qu’il en détruit. Parce que la parole, c’est l’homme ; ce n’est pas une image, ce n’est pas un masque... c’est l’intérieur qui parle ; et il arrive que le vide s’entende bien plus fort que le verbe.
Ceux qui parlent avec le cœur savent le silence qui entoure leurs mots ; ils savent ce que coûte une phrase vraie, ils savent ce que vaut une promesse, ils connaissent le prix du mensonge... Ils avancent avec prudence, non pas par peur, mais par respect, parce qu’ils ont compris que chaque mot contient une étincelle... de lumière ou d’ombre.
Il suffit d’un mot pour redonner vie à quelqu’un, et d’un autre pour lui retirer toute envie d’exister ; ce pouvoir-là est entre toutes les mains, entre toutes les bouches... et il est trop souvent ignoré.
La parole est un miroir, un murmure persistant, un souffle qui accuse ou qui relève... c’est là qu’on reconnaît la dignité ; c’est là qu’on distingue ceux qui tiennent debout dans la nuit... de ceux qui s’effondrent en pleine lumière.
Nadia B.