Ce que l’oubli ne pourra jamais effacer
Nous n’avons jamais vraiment oublié, nous avons seulement appris à faire semblant, à marcher droit, à sourire quand il le faut et à répondre « ça va » alors qu’au fond, quelque chose en nous ne s’est jamais relevé. Ce que nous appelons oubli, ce n’est pas l’absence de souvenirs, c’est un silence volontaire, un espace que nous avons fermé pour pouvoir continuer à respirer sans nous effondrer à chaque coin de rue.
Il y a des choses que nous avons enfermées sans cérémonie, parce que nous ne savions pas quoi en faire, parce que les mots manquaient, parce que personne ne semblait entendre l’intensité de ce que nous avions vécu. Nous avons fermé ces chapitres sans point final, espérant que le simple fait de les ranger suffirait à les faire disparaître… mais rien ne disparaît vraiment… RIEN!
Nous vivons avec ces fragments, dissimulés dans la routine, dans le regard qu’on détourne, dans les larmes qu’on ravale, dans les absences qu’on ne nomme plus. Il suffit d’un détail pour que tout revienne, une odeur, une chanson, un rêve et soudain nous ne sommes plus là, nous sommes ailleurs, au moment où tout s’est brisé, au moment où tout ce que nous sommes aujourd’hui a commencé à se former dans la douleur.
L’oubli ne guérit pas, il camoufle… il ne libère pas, il endort… il ne reconstruit rien, il masque les ruines. Et c’est dans ces ruines que nous apprenons à exister… pas à nouveau, pas mieux, mais autrement. Avec ce que nous avons perdu, avec ce que nous avons gardé sous silence, avec ce que nous continuons à porter même si nous ne l’avons jamais voulu. Nous avons longtemps cru que l’oubli était nécessaire pour avancer, mais ce n’est pas l’oubli qui nous rend plus forts, c’est la mémoire assumée, la douleur acceptée, la tendresse qu’on garde même quand elle fait mal. Il y a des absents qui resteront toujours vivants en nous, il y a des blessures qu’on ne refermera jamais complètement et c’est peut-être ça, notre vérité, notre force, notre humanité.
Nous n’attendons plus l’oubli, nous ne le cherchons plus, nous avons simplement compris qu’il ne viendrait pas et que ce n’était pas grave. Parce que nous n’avons pas besoin d’oublier pour continuer… nous avons seulement besoin d’habiter nos silences, de reconnaître nos cicatrices et de faire la paix avec ce qui n’aura jamais de fin.
Et c’est là, dans ce non-oubli, que nous sommes les plus vivants.
— Nadia B.